Le 13 mai dernier, la CJUE a rendu un arrêt dont elle n'avait sans doute pas mesuré la portée. En jugeant que Google était responsable du traitement des données "personnelles" présentes sur les sites web que le moteur de recherche référence, la Cour de Luxembourg a ouvert la boîte de Pandore. Pis, elle l'a fait en se basant sur une directive de 1995 et dont la révision n'a toujours pas abouti après maintenant deux ans de discussions!
L'affrontement auquel se livrent désormais le "géant américain" et Bruxelles, via CNILs et émissaires interposés, a pris une autre tournure depuis que Google a surpris tout son monde en mettant en place un formulaire en ligne de déréférencement. Tel est pris qui croyait prendre: la CJUE a fait du grand méchant loup le véritable juge de votre vie privée. Mountain View n'en espérait sans doute pas tant.
Ce débat sur le droit à l'oubli, que Google a il est vrai tenté d'initier il y a deux ans auprès des pouvoirs publics (il faut rendre à Caesar...), commence à s'enflammer sur le Net et dans la presse. Aux défenseurs de la vie privée et de l'amnésie numérique répondent désormais les croisés de la liberté d'expression et des paparazzades. Il n'y a pas de gentils et de méchants, on trouve des ayatollahs et des bisounours des deux côtés. C'est l'histoire sans fin de la hiérarchie entre les libertés fondamentales, "j'ai raison et t'as pas tort".
Dans les faits, il faut bien reconnaitre néanmoins que l'arrêt de la CJUE et le formulaire de Google qui en découle portent un sacré coup au travail des journalistes, commentateurs, bloggeurs, twittos et consorts. On compte déjà nombre d'articles, tribunes, billets retoqués en interne, de peur qu'ils soient retirés dès leur publication. Bien malgré elle, l'UE finit par censurer. Venant d'un Prix Nobel de la Paix, on aurait espéré mieux.
Les internautes dans tout ça? En l'espace de deux mois, une décision de justice européenne a été prise, un formulaire de réclamation a été mis en ligne, des articles de presse ont été retouchés et tout ça sans que les principaux intéressés, vous et nous, ne puissent donner leur avis.
Et une fois de plus, Google a un temps d'avance sur les pouvoirs publics, d'où qu'ils soient, et vous demande votre avis: pour ou contre le droit à l'oubli? Bruxelles avait évoqué la question dans une consultation publique sur la révision "fourre-tout" et en suspens de la directive de 1995. Que sont devenues les réponses? Il faudrait peut-être tout remettre à plat, sans nous oublier cette fois-ci.